Je suis un étudiant de 19 ans. Je vis sur Montpellier. Je suis out à mes ami•es, à mon frère et à mes parents. Ces derniers utilisent toujours mon deadname.
Racontez votre parcours jusqu’à comprendre que vous étiez trans. Comment l’avez-vous compris ?
Vers avril 2017, j’ai commencé à aller très mal: troubles dépressifs, anxiété, beaucoup de crise de panique. Je ne savais pas à quoi c’était dû et donc j’ai estimé que c’était à cause du bac.
Le baccalauréat passé, l’été a été très compliqué avec des moments de dissociation de mon propre corps. J’ai ignoré ce mal-être et je l’ai laissé me consumer jusqu’à ce que je décide de revenir habiter chez mes parents et j’ai consulté une psy. Ne sachant pas ce qui n’allait pas, la psychologue m’a demandé de me questionner sur moi-même, de penser à tout ce qui se passait dans ma tête. J’ai recherché des ressources, sur le mal-être, sur la dépression, et sur la recherche d’identité. J’étais transgenre. Mon genre assigné à la naissance devenait trop compliqué vis-à-vis de ce que je souhaitais faire transparaître aux autres. Il y avait peut-être des signes avant-coureurs.
Mais honnêtement, je ne savais pas que la transidentité existait. J’ai toujours été heureux lorsque les gens parlait de moi comme un petit garçon, je voulais ressembler à mon frère mais je prenais ça pour de la jalousie envers ses aînés. Lorsque je sortais avec une fille, décrire notre relation comme lesbienne me paraissait faux. Mais encore, percevoir des signes lorsqu’on est dans l’ignorance totale, c’est compliqué.
J’ai eu du mal à accepter cela. Mais en mars 2018, j’ai commencé à en parler à mes ami•es et j’ai eu la chance d’avoir un soutien merveilleux. Même par des personnes qui ne connaissaient rien du sujet. Mon frère m’a également aidé. Mes parents ont eu plus de mal, une discussion très dure avec ma mère, et depuis s’est installé un déni. J’ai laissé du temps puisque dans mon établissement je suis toujours perçue comme femme.
Ma demande de changement de prénom hors papiers officiels s’est mal passé et, malgré le soutien de mes enseignant•es, le proviseur a refusé. Je suis en train d’essayer de faire changer mon prénom à ma nouvelle université, je compte demander au reste de ma famille de m’appeler Evan et peu importe leur réponse, je reste à jamais légitime. Je suis un homme transgenre et je peux être fier.
Quelles ont été vos inquiétudes ? Comment les avez vous surmontées ?
J’avais réellement peur de m’être trompé, de ne pas être transgenre et de rendre ma vie plus complexe pour rien. J’avais peur de ne pas être légitime, surtout au niveau du manque de dysphorie physique. Il y en a mais moins que ce que je pouvais voir sur les réseaux pour d’autres hommes trans.
Comment se sont déroulés vos coming-outs ? Si vous ne l’avez pas (encore) fait, pourquoi ?
Mes ami•es l’ont très bien reçu, iels m’ont aidé et iels m’ont respecté.
Mon frère m’a apporté son soutien et ses conseils pour en parler à nos parents.
J’ai choisi la lettre pour annoncer cela à mes parents, et de rester chez une amie le soir. Le lendemain en rentrant, tout s’est bien passé jusqu’à ce que mes parents décident de me poser des questions. « Comment le sais-tu? » « Tu sais ce n’est pas un truc à la légère » « Tu sais les hormones c’est pire qu’un traitement contre le cancer, c’est des piqûres tous les jours » Ce qui est faux.
Ma mère ne l’a pas bien pris, et même si j’ai une bonne relation avec elle lorsque je n’aborde pas le sujet, je n’oublierais pas la douleur que ses remarques ont provoquée. J’ai décidé d’attendre de partir de chez moi, pour relancer le sujet afin de pouvoir me ressourcer en cas de rejet. Toutefois, j’ai la chance de savoir que mes parents ne me laisseront pas seul quoiqu’il arrive.
J’ai également fait part à mes professeur•es de ma transidentité pour changer mon prénom au sein de la classe. Iels ont accepté mais le proviseur a refusé pour « me protéger des violences ». Comme si son refus n’était pas une violence en elle-même. Et car « si l’on autorise cela au sein d’une classe, on devra autoriser n’importe quoi y compris la drogue ». Et oui. La bêtise humaine est plus large que ce que l’on croit.
Je ne regrette pas mais j’aurais me mettre en danger si certain•es enseignant•es n’avaient pas été aussi compréhensif•ves.
Racontez quelles sont les personnes qui vous ont aidées durant votre transition.
Mes ami•es ont utilisé mon prénom et mes pronoms très rapidement. Les rares erreurs étaient suivies d’excuses. Iels m’ont aidé à me sentir légitime.
Les réseaux m’ont aussi aidé même s’ils peuvent être sources de questionnements, dysphorie, haines.
Comment se passe votre transition ? Est-ce que ça valait le coup ? Est-ce le résultat auquel vous vous attendiez ?
Je suis ravi d’avoir fait mon coming-out bien qu’il soit encore partiel. J’ai hâte de commencer un traitement hormonal et de me sentir mieux dans ce corps.
Racontez un moment très fort de votre transition
Ma meilleure amie qui m’a proposé une liste de prénom avec l’aide d’une autre amie proche sous ma demande. J’ai pu trouvé ainsi mon 2ème prénom et j’ai trouvé une marraine de transition en quelque sorte et ça m’a rendu très heureux.
Un conseil à donner pour une personne trans qui voudrait se lancer ?
Sache que tu es légitime, et que personne n’a à te dire comment être la personne que tu es. C’est bête à dire mais on est plus vulnérable à certains moments de notre transition et des gens en profitent pour imposer leurs avis transphobes. Protège-toi de ces personnes. Et ne t’inquiète pas, tu sauras t’entourer de bonnes personnes.