Témoignage

Calixte, personne genderfluid de 16 ans

Je m’appelle Calixte (prénom d’usage), j’ai 16 ans, lycéen. Je suis une personne trans-genderfluid, cela signifie que mon genre varie, et j’utilise le pronom « il », peut importe mon genre actuel. Je suis « afab » (assigned female at birth), et même sans avoir de forte dysphorie, c’est assez difficile à vivre pour moi. Heureusement, j’avance petit à petit.

Racontez votre parcours jusqu’à comprendre que vous étiez trans. Comment l’avez-vous compris ?

J’ai vécu une vie banale de « gentille petite fille ». Ayant un cadre familial assez ouvert, je connaissait l’existence des couples homosexuels, tout en sachant également que j’en côtoyait. Il faut savoir j’ai toujours été très discret, et même avec mes cheveux longs de l’époque, je passais pour un « garçon-manqué ».

Vers mon entrée au collège, il y 5 ans, je me suis énormément intéressé à cette communauté à cause de mon envie de les étudier. J’avais un but: voulant devenir psychologue, je me devais de connaître leurs ressentis, de savoir quelles peurs les effrayaient… J’ai appris l’existence des personnes trans il y 4 ans, grâce à un ami rencontré virtuellement, qui l’était lui-même.

A partir de ce moment, je devenais un réel dictionnaire des LGBTI. Je me savais pansexuel, et non-cisgenre. Mais je ne savais pas quoi précisément. On me disait souvent de ne pas me rattacher à une étiquette, mais à cette époque, j’en avais besoin. Je traversais une grande période de souffrances morales parce que je ne savais pas ce qui me définissait.

J’étais pendant 1 ans en errance. Mon genre, je ne le connaissais pas. Je me rapprochais de ce qui semblait être un garçon, sans en être réellement un. Puis, après quelques temps, j’avais un ressenti plutôt féminin. Tout variait.

Et c’est ainsi que je me suis découvert genderfluid à mes 13 ans. C’était juste un mot, je le comprend maintenant, mais c’est ce qui définit est ça m’avait énormément rassuré pendant cette période.

Quelles ont été vos inquiétudes ? Comment les avez vous surmontées ?

Ma première inquiétude a été la réaction de mes proches (parents, amis proches). Par chance, mon ami précédemment cité m’a énormément aidé. Il me donnait confiance en moi. Mes parents, je ne leur en parlais pas tout de suite.

Quelques mois se sont écoulés, et je me retrouvais de plus en plus complexé par mon prénom, qui est très féminin. Alors, j’en ai cherché un autre, un nom d’usage. Calixte. Mon premier nom, et mon nom définitif. J’ai commencé à demander aux personnes à qui j’étais out de m’appeler ainsi. Tout est allé pour le mieux.

Je n’ai jamais vraiment été dysphorique. Mon corps, bien que possédant une poitrine et des organes génitaux féminins, me plaisait. Savoir cela m’a fait me questionner sur ma légitimité au sein de le communauté LGBTI.

Pouvais-je réellement me considérer comme transgenre, sans dysphorie? Bien sûr que oui! La dysphorie ne fais pas la transidentité, il faut le savoir. Je n’ai jamais rejeté mon apparence en tant que afab, mais cela ne VEUT PAS dire que je suis cisgenre.

Comment se sont déroulés vos coming-outs ? Si vous ne l’avez pas (encore) fait, pourquoi ?

Les CO dont je vais parler se sont tous déroulés pendant mon années de quatrième, au collège, à quelques mois d’écart chacun.

Mon tout premier CO s’est très bien passé. Mon ami, rencontré virtuellement, m’a immédiatement accepté, tout en m’appelant par mon nom d’usage.

Mon deuxième, je l’ai fais à deux camarades de classe, que j’affectionnais énormément. Bien que perturbés, il m’ont accepté. A cette époque, je ne demandait pas encore à être genré au masculin, alors ils me désignaient au féminin, je n’avais aucun problèmes avec ça. Par contre, aucun des deux ne m’appelait Calixte, ou alors très rarement.

Mon troisième… a été catastrophique. Je suis conscient que certaines personnes sont jetées hors de chez elles, battues, voire tuées pour ce qu’elles sont, ce n’est pas mon cas. Mais ce CO, à ma mère, avait brisé la sorte de confiance en moi que je m’étais forgé. Tout avais commencé un midi. Je savais que j’allais me confier à ma mère sur mon genre, et j’étais prêt.

J’avais commencé à lui parler un peu d’un ami (qui n’existe pas), genderfluid, tout juste outé à ses parents qui l’avaient bien accueilli (je pense ne pas être le seul à avoir utilisé cette fameuse méthode du « J’ai un ami qui est… » et en fonction de la réponse de l’interpelé « … et bah moi aussi! »).

Je connais ma mère, elle est très ouverte d’esprit. Mais peut-être pas autant que je le pensais. Ne faisant pas attention à ses mots, elle insinua assez clairement que les personnes genderfluid n’existaient pas, ou que ceux qui se définissaient comme tel avaient forcément des problèmes psychologiques.

J’ai été pas mal choqué par ses paroles, et ai reporté mon CO. J’ai… était déprimé pendant quelques semaines après ça. Mais j’en avais marre de toujours fuir son regard, et d’être gêné en sa présence, je lui ai donc parlé et fait face. Je lui ai tout avoué: pourquoi je me sentais déprimé sur le moment, ce que j’étais, et mes autres CO qui s’étaient bien passés. Finalement, elle s’est excusée, et a décidé de prendre le temps d’y réfléchir.

Racontez quelles sont les personnes qui vous ont aidées durant votre transition.

Ceux qui m’ont aidés (jusqu’à maintenant, en tous cas) sont principalement mes deux amis (précédemment cités) du collège, mon meilleur ami virtuel. Ce n’est pas grand chose, mais simplement m’appeler Calixte m’a bien redonné confiance en moi.

Également, je me présente avec ce prénom à toutes les nouvelles personnes que je rencontre. Leur faire comprendre que je préfère être genré au masculin est parfois difficile, mais je ne baisse pas les bras.

Comment se passe votre transition ? Est-ce que ça valait le coup ? Est-ce le résultat auquel vous vous attendiez ?

Je ne suis qu’au début de ma transition, donc je ne pourrais pas témoigner grand chose. Pour mon expérience personnelle en tant que genderfluid, mon genre varie majoritairement entre agenre et garçon, voire neutrois. Alors, voulant également être genré « il », j’essaye d’avoir un passing plutôt masculin. Mais ça ne m’empêche pas de garder robes et jupes dans mon armoire, parce que de temps en temps ça me fait du bien.

En ce moment, je commence à vouloir me faire hormoner, mais je suis encore assez hésitant sur ce sujet, donc je compte attendre encore un peu avant de prendre une décision. Par contre, je veux absolument changer officiellement mon prénom.

Racontez un moment très fort de votre transition

Le jour où je suis passé de mes cheveux longs (qui m’arrivaient jusqu’au bas du dos), à ma coupe courte (rasés derrière la crâne et sur le côté droit, avec une mèche venant du coté droit et assez longue pour la mettre derrière mon oreille gauche).

Bon, la coiffeuse était pas mal réticente au début, mais je lui ai bien fait savoir que c’était pas elle qui décidait ce que je voulais, donc elle a cédé.

Je me sentais revivre, ce jour-là. Ca a fait beaucoup de bien à mon estime et ma confiance en moi.

Un conseil à donner pour une personne trans qui voudrait se lancer ?

Entourez-vous de personnes qui comprendront votre situation, et qui pourront vous appeler et vous genrer comme vous le souhaitez, peu importe si vous êtes une femme trans, un homme trans, ou un trans non-binaire. Si vous êtes dépendant.e de vos parents, prenez votre temps pour leur expliquer, s’ils vous paraissent safe, bien sûr. Si non, attendez de vous émanciper un peu (pas de précipitation).

Personne ne peut prétendre conseiller et aider dans toutes les situations possibles, vous pouvez donc également décider vous-même. Ne vous précipitez pas.

Témoignage rédigé dans le cadre d’une publication pour Wiki Trans. Toute copie est interdite. Merci de respecter ces témoignages.

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