Témoignage

Aéline, femme trans de 18 ans

J’ai 18 ans et je viens de terminer ma première année d’étude supérieures. J’ai obtenu les hormones en Avril 2019 et j’ai commencé à vivre en fille il y a environ un mois. J’ai quelques problèmes de santé qui m’ont souvent posé problème pour commencer ma transition : Diabète 1, maladie cœliaque (maladie de l’intestin), asthme et une maladie génétique qui attaque mon foie.

Néanmoins, bien que ça puisse compliquer les choses, les maladies chroniques, génétiques,… sont souvent un plus petit obstacle que ce que l’on peut imaginer.

Racontez votre parcours jusqu’à comprendre que vous étiez trans. Comment l’avez-vous compris ?

Je me souviens que c’est à l’âge de 10 ans que pour la première fois j’ai compris que quelque chose n’allait pas. Je ne me souviens pas de ce moment exactement, mais j’ai souvenir que c’était comme si un interrupteur s’était soudain allumé et j’ai compris quelque chose : « je veux être une fille ».

C’est cette phrase qui est restée pendant près de 6 ans avant que je découvre que le mot « transgenre » correspondait mieux à ma situation.

Quelques mois après que j’ai compris que je voulais être une fille s’est déclaré mon diabète. Je n’étais pas bien physiquement depuis environ un an et au début je me suis dit que ça devait être ça qui m’a fait pensé que mon corps ne me plaisait pas.

Mais très vite, j’ai commencé à lire des histoires de personne qui se voyaient changer magiquement de sexe ou ce genre d’histoires et à rêver qu’une telle chose m’arrive. Je ne savais pas qu’il était possible de changer, de faire une transition.

C’est à l’âge de 12 ans que j’ai appris l’existence des traitements hormonaux. Mais j’ai lu qu’à cause du diabète, les hormones étaient très souvent refusées par les médecins. Ceci est totalement faux. Un mensonge qui m’a fait attendre très longtemps avant de faire mon coming out. J’y reviendrai plus tard.

Le temps a donc passé, j’ai retardé autant que je le pouvais ma puberté, mais elle a hélas fini par frapper. Je ne me sentais pas bien, mais pensant toujours être bloquée par le diabète je n’en n’ai pas parlé.

En première, j’allais trop mal. Alors je me suis renseignée à nouveau pour les traitements. Et je me suis dit que tant pis pour le diabète, il fallait faire quelque chose. J’ai alors fait mon coming out à mes parents qui s’est assez bien passé. Nous avons cherché un psychiatre pendant longtemps. Sauf que je vivais à la frontière suisse près de Genève, et que cet endroit est un véritable désert médical.

Je devais aller chez le psychiatre à Lyon, ce qui coûtait beaucoup et m’a obligée à n’aller le voir qu’une fois tous les deux mois. Il a donc fallu deux ans et demi pour que je puisse obtenir une lettre pour avoir des hormones.

Durant ces années, je me inscrite sur Twitter, sur lequel je me suis fait de nombreuses amies trans, comme moi, qui m’ont beaucoup aidées.

Je sautes quelques éléments personnels, mais j’ai fini par devoir trouver un endocrinologue en France, d’urgence. J’étais trop mal, ça ne pouvais pas continuer. J’ai donc dû aller à Paris cette fois. Et enfin, en Avril j’obtenais mes hormones. Le plus beau jour de ma vie.

Quelles ont été vos inquiétudes ? Comment les avez vous surmontées ?

J’avais deux inquiétudes principales : mon diabète, qui au final n’est pas un problème du tout.

Et un manque cruel d’informations.

Je me suis toujours sentie seule, les informations que je trouvais n’étaient pas bonne et surtout ma très grande timidité m’a toujours donné l’impression que jamais je n’y arriverai.

Mais c’est faux. Je m’en suis sortie! J’ai réfléchi à des méthodes pour ne pas affronter directement les choses et ainsi vaincre ma timidité. Je faisais mes coming-outs avant une journée chargée, en laissant une lettre ou un SMS. Les mots me permettaient de ne pas dire la chose directement à l’oral, de mieux trouver les mots. Et la journée chargée me permettait d’oublier et ne pas m’inquiéter de la réaction toute la journée.

Lorsque j’étais mal, je ne le disais pas directement. Je le montrais par non verbal, en étant dans la lune et en faisant la tête par exemple. De cette manière, les choses venaient de manière plus douce et la timidité ne m’a pas arrêtée. Elle m’a juste fait prendre un chemin différent.

Certaines personnes escaladent le mur, moi je suis passées par les chemins moins pentus. Mais je suis tout de même arriver à l’objectif, et c’est ce qui compte!

Comment se sont déroulés vos coming-outs ? Si vous ne l’avez pas (encore) fait, pourquoi ?

J’ai fait mon coming out à presque tout le monde. Seul une partie de ma famille éloignée ne sait pas encore.

J’ai commencé par mes parents, puis mes frères. En laissant des mots et des SMS.

Pour mes amis, l’une d’entre eux a fait un coming out en tant que pan, et j’en ai profité pour faire le mien. Puis ensemble on en a parlé à tout le monde.

Globalement, le plus facile a été de passer par un mot écrit/un message. Les gens peuvent plus réfléchir, et c’est moins stressant a mon goût.
Sinon, le faire avec l’aide d’un(e) ami(e) est parfois aussi simple.

Les réactions ont souvent été étonnamment positives. Mais il faut toujours essayer de s’attendre au pire mais de rester optimiste. C’est bien de se blinder pour se protéger des mauvaises réactions, mais c’est aussi important de ne pas être trop brut et soi-même provoquer une mauvaise réaction ou une mauvaise interprétation.

Racontez quelles sont les personnes qui vous ont aidées durant votre transition.

J’ai été beaucoup aidée par des amies que j’ai rencontré par internet (principalement twitter).

Avoir des personnes transgenre à qui parler aide beaucoup, car ils vous comprennent souvent mieux que personne. Néanmoins avoir du soutien dans la vie est très important, et c’est une amie du lycée qui m’a personnellement beaucoup aidée.

Elle prenait de mes nouvelles et m’obligeait à sortir. L’avoir à mes côtés m’a beaucoup aidée à me développer et à mieux me sentir.

Avoir du soutien est très important.

Comment se passe votre transition ? Est-ce que ça valait le coup ? Est-ce le résultat auquel vous vous attendiez ?

J’ai commencé ma transition il y a peu, mais déjà je me sens mieux. J’avais peur du regard des autres avant mais je me rends compte que les choses se passent très bien. Les gens se fichent bien de savoir si je suis trans ou non. On se fait souvent un monde en s’imaginant dehors avec tout le monde qui nous regarde, mais c’est faux. Tout est… juste normal ! Les gens s’occupent de leurs affaires et je m’occupe des miennes.

Et ça me rend très heureuse. J’avais peur que la transition ne m’aide pas tant que ça, mais réellement, ça fait un bien fou!

La dysphorie est moins présente et pour la première fois de ma vie je prends plaisir à sortir.

Racontez un moment très fort de votre transition

Dans les premiers jours de ma transition, je suis allée dormir chez deux amies du lycée. Elles ne m’avaient encore jamais vue en fille, et je ne les avaient pas vues depuis mon coming out.

Lorsque je suis arrivée à la gare, en fille, elles m’ont attendue avec un panneau avec mon prénom. Mon vrai prénom, Aéline. Et c’était un très beau moment. C’est le moment où j’ai réalisé que ça y est, je pouvais enfin être moi.

Nous avons fait du shopping ensemble, sommes allées au cinéma, etc… Ce furent probablement parmi les meilleurs jours de ma vie.

Je n’étais pas le copain devenu copine, j’étais leur copine, point. C’est une sensation assez dure à expliquer… J’étais moi-même, pour la première fois en 18 ans.

Un conseil à donner pour une personne trans qui voudrait se lancer ?

Je vais utiliser une métaphore pour expliquer mon conseil.

Lorsqu’on est trans, encore dans le placard, on est comme face a une falaise, qui peut paraître infranchissable. Au sommet de trouve le bonheur, la joie d’être enfin soi-même.

Beaucoup pourraient se décourager en voyant cette falaise, mais ce n’est pas ce qu’il faut faire. Il faut réfléchir, se préparer un peu.

Quand on fait plus attention, on remarque que la falaise est séparée en plusieurs petits murs les uns à la suite des autres :

  • le coming-out
  • les étapes telles que le psychiatre, l’endocrinologue,…
  • les hormones
  • la transition
  • etc…

La première étape avant de franchir une falaise, c’est se préparer. Se renseigner sur les coûts de la transition, comment marchent les hormones, … : tous les détails qui pourront vous servir.

Et en y réfléchissant bien, il y a plusieurs moyen de monter une falaise. On peut se préparer à l’escalader ou on peut la passer autrement, en passant par des chemins qui font le tour de la montagne.

Il y a plusieurs manières de faire les choses, et il faut trouver sa méthode. Je suis passée par les chemins montagneux en passant par l’écrit plutôt que l’oral pour mes coming out par exemple.

Chacun a sa manière de faire, son rythme, son chemin à travers, mais s’il y a une chose importante à retenir, c’est de ne jamais perdre espoir, ne jamais se décourager. Parce que vous finirez par y arriver, et plus vous vous accrocherez, mieux ça se passera!

Témoignage rédigé dans le cadre d’une publication pour Wiki Trans. Toute copie est interdite. Merci de respecter ces témoignages.

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